Les Océans, conférence du 26 Novembre 2019

La salle était comble le mardi 26 Novembre à l’occasion de la conférence sur les océans organisée par l’équipe d’Alma Mater. Trois associations, cinq intervenants… de quoi captiver l’auditoire et le sensibiliser sur des questions écologiques et citoyennes concernant la préservation d’un milieu qui recouvre 70% du globe. 

 

Sous l’océan !

Le premier groupe à capter l’attention du public était composé de deux membres de SPLAAASH. L’association étudiante de plongée sous-marine entraîne ses adhérents en fosse dans des piscines, avant de les emmener plonger pour de bon dans une réserve naturelle au large de l’Espagne. Le but ? Initier à la plongée bien sûr, mais aussi sensibiliser à la composition et la protection des espèces sous-marines, végétales ou animales ! Au sein de l’équipe, des sportifs confirmés, des amateurs, mais  également des passionnés du monde aquatique comme Yoann. Formé en écologie marine et en océanographie, spécialiste du plastique et de la biomarine, ce dernier partage sa passion en donnant des cours de biologie aux membres de l’association, afin de leur apprendre à reconnaître les espèces qu’ils croiseront lors du stage de fin d’année. Car au delà de la pratique sportive, l’association mène aussi des opérations de récupération de déchets lors de son séjour à l’Estartit, en Espagne : malgré son statut de réserve naturelle intégrale, le lieu n’échappe pas à la pollution.

Pour les sportifs à la recherche de nouvelles sensations ou les curieux, l’association organise également des baptêmes de plongée. Les entraînements en fosse ont lieu à Chartres ou à Bruxelles et sont l’occasion de séjours de cohésion à des frais raisonnables. Et pour aller jusqu’au bout de sa démarche, SPLAAASH organise également des apéros “zéro plastique” en région parisienne et est en train de nouer un partenariat avec Surfrider Foundation, une association basée à Biarritz qui dépollue les mers et les terres !

 

Citoyens engagés. 

L’engagement écologique et citoyen est donc à la portée de tous, et sous de nombreuses formes. Nul besoin d’être adepte de palmes et de tubas pour préserver la planète ! Les membres du Collectif Citoyens pour le Climat, eux, ne plongent pas voir les anémones, mais ils font un travail de surface tout aussi important. Créé après la démission de Nicolas Hulot, ancien ministre de l’écologie, le collectif est composé comme son nom l’indique de citoyens aux compétences multiples. Il est surtout connu pour avoir contribué à la traduction et à la synthétisation du rapport du GIEC, le Groupe d’Experts Inter-environnemental sur l’Évolution du Climat.

Traduire ce rapport, c’est du travail. À l’origine, il est écrit en anglais et fait plus de 1000 pages, puis une version synthétique de 40 pages est publiée pour le grand public. Le Collectif traduit donc ce rapport, et propose une ultime synthèse de moins de dix pages, afin que tout un chacun puisse s’informer et comprendre les enjeux le mieux possible. Ils sont environ une vingtaine à travailler sur cette traduction, y compris des citoyens de formation scientifique, qui aident à choisir les bons termes et à synthétiser les données de la manière la plus claire possible.

Il va sans dire que le constat final n’est que peu réjouissant. L’océan se réchauffe, la cryosphère fond, la banquise risque de disparaître d’ici la fin du siècle, le dégel du permafrost libère du méthane qui réchauffe l’atmosphère et les écosystèmes aquatiques sont en première ligne de tous ces changements dramatiques. “Que des bonnes nouvelles !” lance ironiquement l’intervenant. La salle, attentive, voit défiler à l’écran des graphiques très techniques, mais pas besoin d’être formé en biologie marine pour comprendre que la situation est urgente. Et si l’urgence est connue, les solutions, elles, le sont un peu moins et se mettent en place assez lentement : poldérisation, constructions de digues, déplacement des populations vers l’intérieur des terres, il ne s’agit pas uniquement de ramasser les sacs plastiques et de rouler en vélo, même si ces actions ne sont pas à négliger. Des actions à grande échelle sont nécessaires pour limiter les dégâts.

A la fin de l’intervention, la salle est silencieuse, un peu inquiète. Une main se lève, une question est posée : le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris a-t-il un impact sur le GIEC ? En réalité, comme le précisent les deux membres du collectif, pas tellement. Les recherches sont faites, les éléments sont connus, et le GIEC est avant tout un organisme de compilation des données et des recherches. Le temps est aux mesures et aux décisions.

 

Le Kraken, de monstre à sauveur des mers. 

Des mesures, certains en prennent déjà, à leur échelle. Mais l’échelle de Julien est plus grande que lui, puisqu’il s’agit du trois mâts de son association Wings of the Ocean. Pendant six mois, le jeune homme a parcouru les mers à bord du Kraken afin de dépolluer les plages et de sensibiliser les populations. 75 000 mégots et 3350 kilos de déchets plus tard, il est venu nous raconter ses découvertes, ses difficultés et ses projets.

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Acheter un trois mâts et partir six mois à la chasse au plastique quand on a jamais fait de voile, cela peut sembler ambitieux. Pour Julien, qui a déjà passé un an sur un bateau de Sea Shepherd, c’était un défi aussi fou que nécessaire. Malgré les blagues et les petites répliques qui font rire et sourire l’assistance lors de son intervention, le constat, lui est morose. Dans les Îles Sanguinaires corses, pourtant classées réserve naturelle, l’équipe ramasse 450kg de déchets. Aux Canaries, sur 1m² de plage, ils comptent 250g de microplastique. Les 75 000 mégots ramassés par l’équipe équivalent à ce qui est jeté par terre en l’espace d’une heure à Marseille. Des chiffres à faire tourner la tête, qui reflètent une réalité bien loin de celle des cartes postales et des plages de sable fin.

Pourtant si le jeune homme semble quelque peu abattu par ce constat, il ne souhaite pas s’arrêter là. Pour 2020, Julien et son équipe comptent embarquer pour un Clean Med Tour, d’abord pendant un mois de Sète à Nice, puis dans les Cyclades Grecques. Là-bas, il s’agit de dépolluer en récupérant les montagnes de gilets de sauvetage et les embarcations coulées laissés par les vagues d’immigration. Dernière étape, Malte, où la production de déchets plastiques a triplé en 10 ans, en raison notamment du tourisme de masse. En plus des actions de dépollution des plages, l’équipe du Kraken donne des conférences et intervient dans les écoles afin de sensibiliser les populations.

D’autres projet sont en cours, dont un, massif, de dépollution des fleuves les plus polluants du monde. Il s’agirait de placer aux embouchures des chaluts et des navires récupérateurs afin de récolter les  déchets avant qu’ils n’atteignent l’océan. De tels projets demandent des fonds conséquents : pour dépolluer 10 fleuves sur une durée de 3 ans, l’association aurait besoin de quinze millions d’euros, et compte utiliser du matériel made in France. Les chaluts Thomsea sont utilisés par la Marine Nationale et les barges équipées de grues proviendraient d’une PME française, EcoTank. Autre possibilité de financement, la création de produits à base de plastiques recyclé, comme des chaussures ou des textiles. En conclusion, Julien souligne avec amertume la difficulté de se voir allouer des fonds gouvernementaux pour des actions qui, pourtant, concernent tout le monde – au sens le plus large.

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Pendant deux heures et demies, les intervenants ont captivé le public et ont su mettre en avant la nécessité de préserver les océans, en surface comme au fond, sur leur littoral comme à leur création aux embouchures fluviales. C’est autour d’un buffet préparé par l’équipe du journal que le public et les membres des trois associations se sont retrouvés à l’issu de la conférence, afin d’échanger et d’envisager un avenir plus propre, sous un ciel et dans des océans plus bleus.

Chloé Touchard

 

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