Ancienne étudiante à Nanterre puis à Paris VIII, Danielle Simonnet y était déjà impliquée dans le syndicalisme étudiant. Conseillère municipale à Paris depuis 2001, elle est tête de liste France Insoumise aux prochaines élections.
Vous parlez d’un “plan logement”, en quoi consiste-t-il concrètement ?
Il y a un manque de volontarisme de la part de l’exécutif municipal, qui pense qu’avoir des dettes, c’est problématique. La ville se vante de mettre en place 1000 logements étudiants par an mais on en est très loin. La priorité pour moi n’est pas la construction parce qu’il n’y a pas assez d’espaces verts. L’urgence est de préempter pour transformer les logements vides et bureaux vacants.
Il faut également un service de logement qui puisse vraiment contrôler les abus que l’on peut constater sur Airbnb ou dans les logements étudiants, dont beaucoup ne sont pas aux normes.
Cette question du logement étudiant nous amène à celle de la précarité, que comptez-vous faire pour lutter contre celle-ci ?
A l’échelle de la ville, on peut contribuer à des espaces de gratuité qui améliorent le coût de la vie, par exemple pour les transports. La question de la santé est également très importante : il y a une urgence à développer des centres municipaux de santé en secteur 1, des bus santé devant l’entrée des fac et un centre de dépistage gratuit dans chaque arrondissement. Idem pour les centres de planification familiale, il y en a trop peu. Il est aussi important d’agir sur le transport, sur la santé que sur la culture.
La ville pourrait aussi aider à l’emploi, tout en faisant attention à ne pas instrumentaliser les étudiants pour précariser le service public. J’ai soutenu l’émergence d’une coopérative d’intérêt collectif, (S)CIC, dans laquelle la ville peut fortement s’impliquer, de manière financière comme médiatique. Les livreurs auraient alors le statut salarié, ce qui change tout.
SÉCURITÉ
Le rôle d’une équipe municipale c’est de faire, avec les habitants, en sorte que nous évoluions ensemble. La commune doit être un outil de protection des citoyens et Il doit y avoir des points d’accès au droit, des élus qui s’engagent pour être à l’écoute et interpeller par le pouvoir symbolique qu’ils ont.
La présence humaine rassure et dissuade, c’est ce qu’il faut développer partout. Mais on a besoin d’autres mesures pour lutter contre le harcèlement : premièrement donner beaucoup plus de moyens aux associations pour l’éducation à l’égalité dès l’école primaire. On ne fait pas assez pour la lutte contre la domination patriarcale, les LGTBphobies, la sérophobie, etc. Ensuite on sait qu’il y a beaucoup de discriminations dans le sport, on pourrait donc conditionner les subventions et autorisations au fait que les associations s’engagent contre ces discriminations. On est toujours dans l’incantatoire, il faut aussi faire dans la coercition.
ÉCOLOGIE
Paris est une ville anti-écologique parce qu’elle a tout misé sur son attractivité. Elle fonctionne, un million de personnes viennent y travailler chaque jours, mais ne peuvent y vivre du fait de la gentrification. Bien évidement, je suis pour la piétonisation des voies sur berges et des quartiers ainsi que la gratuité des transports, mais je voudrais aussi sanctuariser les espaces verts de la ville et avoir un objectif de reconquête d’au moins 700 hectares d’espaces verts dans la mandature. Mais pour cela il faut revoir la conception de la métropole, dans une logique de coopération de territoire. Il faut apprendre à penser la mixité entre l’emploi, le logement, les services publics et les espaces verts. Construire des continuités vertes entre les différents espaces verts. Faire revivre la Bièvre, une rivière oubliée, qui ferait respirer de nouveau la ville et rappellerait un Paris populaire.
Il faut impérativement se poser la question des causes, arrêter le greenwashing. Paris doit devenir une métropole polycentrique et arrêter la ségrégation spatiale qui est anti-écologique. Mais je souhaite aussi que l’on arrête les constructions en béton. Les conventions de la centrale Lafarge renouvelées pour Paris Plage sont pour moi une aberration. On peut se passer complètement de béton dans les constructions. ll faut s’en débarasser pour privilégier les matériaux qui font respirer notre espace urbain.
En quoi le fonctionnement de votre campagne vous différencie des autres candidats ?
L’action du droit à la ville est notre enjeu, donc la méthode de campagne est essentielle. Nous avons prôné une démarche municipaliste en organisant des rencontres et ateliers sur différents thèmes et en faisant du porte à porte dans tous les quartiers.
En une phrase, pourquoi un étudiant a tout intérêt à voter pour vous?
Les étudiants doivent eux aussi décider de Paris ; à chaque grande page de l’Histoire, la jeunesse, notamment la jeunesse étudiante, a toujours eu un rôle déterminant. Ceux qui vivent à Paris doivent décider de son avenir, et pour cela les étudiants ont une place centrale.
Propos recueillis par Camille PATURANGE et Valentine L. DELETOILLE
illustration : Raphaelle DREYFUS