Célébrons l’absurdité de nos Vie(s) avec la troupe Définitivement Bonsoir

Dans le hall du Centre de la Jonquière, devant la porte du théâtre, l’ambiance s’échauffe. On attend Vie(s) de la troupe Définitivement Bonsoir. Pour surmonter leur impatience, les spectateurs discutent de leurs goûts dramaturgiques. L’une préfère les théâtres publics, bien moins prétentieux selon ses dires, l’autre les cabarets avec des travestis pour plus d’exubérance et un dernier raconte sa stupéfaction en entrant pour la première fois au Théâtre du Soleil. Des goûts bien différents… Et pourtant, dès que la pièce commence, l’audience paraît n’être plus qu’une seule et même personne : les mêmes rires, les mêmes applaudissements et le même étonnement.

Qu’est-ce qui se passe ? C’est la question que beaucoup se posent quand la porte de la salle s’ouvre. Nous sommes directement accueillis par les comédiens qui, l’air de rien, retrouvent certains de leurs amis avant de monter sur scène, discutent entre eux, sortent des textes pour répéter. Ils installent le décor, se coiffent, se maquillent, se changent devant nous. La lumière se tamise progressivement, si bien que l’on ne sait pas quand on passe du réel à la représentation. Pour la bonne raison que la pièce a déjà commencé, et ce, dès la première seconde ! L’homme que nous voyons monter sur scène une fois le noir fait, n’était-il pas le vendeur de la billetterie ?

Dans le public, on se regarde, on s’interroge, et puis on n’en a plus le temps. On se fait prendre par le tourbillon des scènes qui se succèdent : un mariage qui vole en éclat, une amitié qui explose, une prostituée qui pète un plomb et une femme de ménage qui parle de remariage alors que derrière elle se cache le cadavre de son ex-mari qui vient de se suicider.

Des situations dont on ne sait si elles doivent nous faire rire ou pleurer. La pièce cultive cet entre-deux qui est bien celui de nos vies et qui finalement est assez rare dans les œuvres dramatiques. Nous arborons une expression paradoxale avec un grand sourire et des yeux tristes. Nous sommes perdus, mais nous n’avons qu’une envie : celle de se laisser prendre par cette effervescence. Et tant mieux, puisque tout est fait pour ! À l’image de la vie qui ne peut être contenue, ce qui se passe sur scène déborde dans le public où se cache un comédien et dans les couloirs derrière les gradins où s’en cache d’autres. Nous faisons partie de cet ensemble. Le spectateur fait corps avec la troupe. On s’adresse à lui, on lui demande de répondre, et on le fait même chanter. Une reprise plus qu’approximative de Can’t Take My Eyes Off You accompagnée d’un ukulélé restera certainement dans les souvenirs de beaucoup de spectateurs….

Absurde n’est-ce pas ? Et jouissif à la fois !  C’est un collage imaginé et mis en scène par Théo Mura à partir de trois pièces de Joël Pommerat : La Réunification des deux Corées et Je tremble (1 et 2). Un grand projet pour une troupe qui s’est formée depuis moins de trois ans sur les bancs de la fac de Nanterre et qui a dû faire face à la crise du Covid. Un grand défi pour les acteurs également, qui doivent passer d’un rôle à l’autre en quelques minutes seulement. « Changer de costume aide beaucoup, explique Pauline Baron, une des actrices. Et puis une fois que le spectacle commence, on ne réfléchit plus, on est dans le rythme. On se laisse embarquer par toute cette énergie. »

Vous aussi, laissez-vous embarquer et rendez une petite visite à la troupe Définitivement Bonsoir pour voir Vie(s) le 16 juin à Montreuil lors du Festival Détonnants amateurs – Amathéâtre. En attendant, tenez-vous au courant de leurs actualités sur Instagram : @definitivementbonsoir

Enora Abry

Image : ©Affiche de la pièce Vie(s)

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