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Le true crime et la médiatisation des affaires criminelles : naissance d’un phénomène culturel 

Depuis maintenant plusieurs années, le true crime voit sa popularité grimper en flèche, révélant une nouvelle mine d’or pour le monde du divertissement. Si vous avez jusqu’alors échappé à cette tendance, sachez que le true crime est un genre d’abord littéraire,  qui s’est ensuite déplacé vers la télévision et les podcasts notamment. Il consiste à raconter des affaires criminelles qui ont réellement eu lieu, voire qui ne sont pas encore résolues. Tout cela bien sûr avec une mise en scène sombre et dramatique pour attiser la curiosité des amateurs. 

Il existe toutes sortes d’émissions de true crime. La plateforme de streaming Netflix a par exemple beaucoup exploité cette niche en produisant et diffusant des documentaires sur des criminels célèbres. Il y a ainsi une mini-série sortie en 2019 sur Ted Bundy, tueur en série qui a terrorisé les États-Unis dans les années 1970. Le documentaire comporte des extraits d’interviews, des enregistrements audios du tueur dans le couloir de la mort, et des images d’archives… de quoi faire frissonner les spectateurs. Outre les documentaires de ce type, le true crime est aussi populaire sous le format podcast, par exemple en France avec l’émission L’Heure du Crime sur RTL, présentée par Jean-Alphonse Richard du lundi au vendredi.  Celle-ci entraîne les auditeurs dans les arcanes de la police et de la justice grâce à des récits d’enquête rendus plus vivants par l’intervention de spécialistes et de témoins.

A quand remonte ce succès des récits d’affaires criminelles? Quand est-ce devenu divertissant pour le public? C’est d’abord à travers la fiction que les récits d’enquête ont eu une forte popularité, avec les romans policiers, les séries et les films. Cela remonte même à l’époque des penny dreadful, ces courts récits d’histoires macabres vaguement inspirées de faits réels, populaires durant le XIXe siècle, qui se vendaient pour 1 penny au Royaume-Uni. Cette fascination du public pour les récits qui provoquent le frisson ne date donc pas d’hier. Aujourd’hui, les récits de faits réels ont plus de succès, sans doute parce que le fait que ces crimes aient vraiment eu lieu attise la curiosité malsaine présente chez chacun de nous. Et le frisson n’en est que plus fort. D’après la psychologue états-unienne Chivonna Childs, si le true crime nous attire autant, c’est parce qu’il « nous laisse entrevoir l’esprit d’une vraie personne qui a commis un acte criminel ». C’est un phénomène psychologique courant, qui émane simplement de la curiosité. Cependant, cela peut aussi avoir des conséquences néfastes sur les amateurs du genre, comme la paranoïa ou l’anxiété.

Outre les aspects psychologiques de ce phénomène, un problème moral se pose. En effet, toute une économie s’est développée autour du true crime, qui est désormais une grosse branche de l’industrie du divertissement, et qui brasse des sommes d’argent astronomiques. Mais faire d’enquêtes réelles un simple divertissement, et les exploiter pour générer du profit, peut paraître irrespectueux vis-à-vis des personnes impliquées dans l’affaire. D’autant plus que de nombreuses affaires ne sont pas encore résolues quand elles sont utilisées pour divertir les spectateurs…

Rosanna Airiau

Sources :

Image : ©Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0

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