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Pouvoirs exécutif et législatif : la rupture

Majorité relative, 49.3, motions de censure… La politique française en branle-bas de combat

Le soir du 19 juin 2022, les résultats des élections législatives françaises tombent. D’une majorité absolue dans l’hémicycle, le parti présidentiel est réduit à une majorité relative, tandis que la Nouvelle Union Populaire, Écologique, et Sociale (Nupes), ainsi que le Rassemblement National (RN), réalisent un score historique. Une majorité présidentielle relative prise en étau, une application répétée de l’article 49.3, et le vote de motions de censure à droite comme à gauche de l’échiquier : faisons le point.

Une politique actuelle datant de 1958

Tout d’abord, intéressons-nous quelque peu au vocabulaire spécifique relatif aux actualités de politique intérieure. Pour commencer, la majorité absolue s’acquiert au sein de l’Assemblée nationale, à l’issue des élections législatives qui ont lieu tous les cinq ans. Elle consiste donc en l’accaparement, pour un parti, de la moitié des sièges, plus un. La majorité relative est bien différente tant dans son obtention, que dans ce qu’elle implique. Cette relativité est simplement portée par le parti ayant obtenu le plus de sièges, et ne garantit pas une supériorité drastique pour le parti concerné. 

En France, nous sommes dans ce que l’on nomme un régime présidentiel, certes démocratique, puisque le Président de la République est élu au suffrage universel direct, mais également tourné en faveur du chef de l’État, afin que celui-ci puisse entreprendre la plupart des manœuvres politiques dont il a l’initiative. Ce type de régime a été instauré par Charles de Gaulle en 1958, avec l’avènement de la Vème République. 

L’article 49 alinéa 3 est quant à lui un incontournable de la politique française. Par son application, le gouvernement peut faire passer un texte de loi sans avoir recours aux votes du Parlement, soit de l’Assemblée nationale et du Sénat. Cet article a vu le jour au sein même de la Constitution du 4 octobre 1958.

Concernant les motions de censure, elles sont, selon le site Vie publique, « le moyen principal du contrôle exercé sur le gouvernement par la chambre basse ». D’après la même source, « l’Assemblée nationale a théoriquement droit « de vie ou de mort » sur le gouvernement ».Toujours est-il que, pour renverser le gouvernement, la grande majorité des députés doivent s’accorder dans l’élaboration d’une seule et même motion de censure, et par conséquent, faire fi de tous leurs désaccords politiques.

La cinquième République en pratique

Durant la troisième semaine d’octobre 2022, deux articles 49.3 ont été employés par le gouvernement d’Elisabeth Borne, en l’espace de deux jours. D’une part concernant le budget pour l’année 2023, et d’autre part pour le budget de la Sécurité Sociale. Ils ont été suivis de deux motions de censure respectivement déposées par la Nupes et le RN, les deux partis d’opposition. Suite à la deuxième utilisation du 49.3 par l’exécutif, la Nupes manifeste de nouveau son mécontentement par une autre motion de censure. Le RN n’a d’abord pas renouvelé la sienne, puis s’est aligné sur celle de la Nupes, sans davantage de succès, le gouvernement n’ayant pas été renversé. Les Républicains (LR), quant à eux, prônent une stratégie de non-alignement. Il est par ailleurs capital, ici, de comprendre pourquoi une telle défiance à l’égard du gouvernement se fait ressentir. 

Cette mésentente entre l’exécutif et l’Assemblée nationale n’est que le point d’acmé d’un phénomène antérieur. De fait, depuis les résultats des élections législatives de 2022, le bloc macroniste doit se satisfaire d’une majorité relative, et non absolue comme ce fût le cas de 2017 à 2022. Cela a un impact considérable sur la prise de décision des textes de loi puisque si la Nupes et le RN choisissent de s’unir pour voter en faveur, ou inversement, d’une loi quelconque, ils sont en nombre suffisant pour faire pencher la balance, et ainsi faire office de contre-pouvoir conséquent à l’encontre de la coalition Ensemble. En effet, la Nupes et le RN comptent respectivement, selon le journal La Croix, 150 et 88 députés, contre 250 pour Ensemble. Jordan Bardella, candidat à la présidence du RN, dénonce par ailleurs la position du groupe LR qu’il qualifie de « béquille du Gouvernement » (édition spéciale législatives sur TF1 le 19 juin 2022). 

Deux pôles : une résistance 

Si nous résumons la situation, la Nupes et le RN ont donc un impact considérable dans les décisions prises au sein de l’hémicycle alors que la majorité présidentielle se restreint, et cela réduit par la même occasion l’éventail de possibilités quant aux différents textes de lois prônés par l’exécutif et pouvant être adoptés. Implicitement, c’est ce qui pousse le gouvernement Borne à avoir recours au 49.3, afin de pallier tout débat au Parlement qui retarderait l’adoption de la loi, ou qui pourrait même en modifier le fond par divers amendements. Mathilde Panot, cheffe de file de La France Insoumise (LFI) à l’Assemblée nationale, exprime son désaccord quant à l’emploi du 49.3 : « Le macronisme est devenu un autoritarisme », a-t-elle déclaré à la presse (Sud Ouest), dénonçant ainsi le caractère anti-démocratique d’une telle mesure.

Doryann Lemoine

Sources :

Site Légifrance

Site Vie Publique

Journal La Croix

Édition spéciale législatives sur TF1 le 19 juin 2022

Journal Sud Ouest

Couverture : ©CC BY-SA 3.0

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