Deux portraits, monumentaux et inséparables, d’un couple, peints par Rembrandt, sont de retour au musée du Louvre depuis le 21 février, pour une durée de cinq ans.
En 2016, la France et les Pays-Bas achètent conjointement les deux tableaux du peintre néerlandais à la famille Rothschild pour quatre-vingts millions d’euros chacun. Un accord inédit et innovant signé par les deux pays stipule les dispositifs de cette acquisition. Afin de garantir leur conservation, il leur est interdit de séparer les époux et de les prêter à un autre musée pour une exposition temporaire. Ainsi, ce sont le musée du Louvre et le Rijksmuseum d’Amsterdam qui se partagent la garde. Le dernier séjour parisien du couple remontait à janvier 2019. C’est la première fois qu’ils seront exposés pendant plusieurs années à Paris, jusqu’en 2029, dans la salle Rembrandt au musée du Louvre, après cinq ans passés à Amsterdam.
Portraits exceptionnels
Ce duo de portraits constitue un chef-d’œuvre de la jeunesse du peintre néerlandais et les seuls portraits en pieds, plus grands que nature – 2 mètres par 1,5 mètre chacun – de modèles debout, connus de son œuvre. Peintre majeur de l’école hollandaise du XVIIe siècle et figure du baroque, Rembrandt est connu pour ses nombreux autoportraits et pour son traitement de la lumière, le clair-obscur. Les toiles ont été commandées en 1634 par le couple à l’occasion de leur mariage : l’homme, Martens Soolmans, appartient aux Pays-Bas et la femme, Oopjen Coppit, à la France. Volonté affichée des époux, appartenant à la haute aristocratie hollandaise : montrer leur statut social. Un épais rideau noir unit les œuvres. L’homme tend un gant à la femme qui lui répond par le mouvement de son éventail vers lui. Des nœuds similaires noués à leur taille et de la fine dentelle blanche couvrant leurs épaules les lient. Le détail de leurs ornements et les habits noirs, teinture onéreuse à l’époque, révèlent l’opulence des époux. La matière brillante des habits témoigne du réalisme qui s’accorde aussi à la carnation et aux visages des notables.
La trajectoire des époux
Après être passés entre les mains de collectionneurs, les tableaux sont achetés par Gustave de Rothschild, célèbre banquier. Lorsque la famille Rothschild décide de s’en séparer, pour cent soixante millions d’euros, la France se questionne sur la façon de conserver les toiles sur le sol national. Huit millions d’euros environ par an, c’est le budget d’acquisition du Louvre. Il fallait trouver une solution pour empêcher que ces tableaux ne soient achetés par d’autres pays ou de grandes fortunes. L’accord entre le Gouvernement français et l’État néerlandais fait des époux les ambassadeurs de l’amitié franco-néerlandaise.
Clémence Le Maître