Gratuit ne veut pas dire mauvais
Alexandre Pouchard, responsable adjoint des décodeurs au Monde a répondu à nos questions sur la manière de s’informer et nous a parlé de son enquête autour des « paradise papers ».
Une journée pour un journaliste aux décodeurs du Monde qu’est-ce que c’est ?
On est une petite équipe de douze personnes, et comme dans toutes les rédactions, on fait des conférences de rédaction le matin, on brasse l’actualité pour voir quels sujets on va traiter dans la journée. On ne fait pas de « l’actu chaude », on prend du recul par rapport à l’information. On prend des sujets plus « tièdes » et l’on essaye d’être pédagogique ; rendre une information parfois complexe facilement intégrable par un format original, visuel et explicatif. Notre lectorat est globalement plus jeune qu’un lecteur traditionnel du monde. Du coup on adapte nos sujets et le format qu’on propose.
Vous avez participé aux révélations sur les « Paradise Papers », soit des révélations touchant des multinationales et des personnalités de la vie publique impliquées dans des montages fiscaux par l’utilisation de sociétés offshore (des sociétés exemptes d’impôt), pouvez-vous revenir sur le déroulement d’une telle enquête ?
Tout part d’un journal allemand : le Süddeutsche Zeitung qui remet au consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) une somme colossale de données. On a été convoqué à une réunion et on nous a présenté les paradise papers. Quand on a reçu les données, il y avait quelque chose comme treize millions de documents ! Traiter une telle masse de documents demande de partir un peu à la pêche. Et une fois qu’on trouve un nom, une entreprise, il faut remonter le fil ! Ça a pris près d’un an d’enquête entre le moment où l’on a reçu les données, fin 2016 et où l’affaire est sortie, novembre 2017. Il faut être extrêmement prudent quand on travaille avec des données de ce genre. Ne rien envoyer par mail – ou alors crypté – aucun Google Doc, texto, il faut une messagerie sécurisée. Il faut toujours avoir cette idée de sécurisation en tête !
Concernant les moyens de s’informer, quels conseils donneriez-vous ?
Deux choses : multiplier les sources et les croiser. Il ne faut pas s’arrêter à un seul journal, même si c’est Le Monde (rire). Il faut ouvrir l’Express, Le Monde, le Figaro, Libé… Et après il faut croiser ses sources. Si vous avez une information, il faut la vérifier sur d’autres journaux, voir comment ils la traitent.