Au coin d’une rue, deux silhouettes se glissent dans un conduit et referment sur eux une lourde plaque posée en équilibre sur un échelon glissant : ils sont entrés dans les catacombes.
Aujourd’hui, les catacombes existent sous Paris et ont tout d’un vrai labyrinthe de sous-sols, indépendants de la surface. On y pénètre par des entrées cachées, aussi bien par une plaque dans une alcôve tortueuse du quartier Latin que par une ouverture sur un trottoir avenue Kléber.
Une fois sous terre, on découvre dans une chaleur moite un véritable monde souterrain : 300 km de galeries réparties sur trois niveaux, dans lesquelles on peut trouver des salles étriquées, des tags, des sculptures (de chimères) inquiétantes, des couloirs interminables ou encore des nécropoles macabres.
On appelle ces basses-fosses « catacombes » par abus de langage car en réalité on n’y trouve que très peu d’ossuaires. La plus connue est celle de Denfert Rochereau et seulement une petite partie se visite aujourd’hui, comme un musée, bien qu’elle soit largement plus vaste. À l’origine, ce réseau a été creusé pour extraire de la pierre. Toutefois, la combinaison du besoin de refouler les cimetières parisiens hors de la ville et l’instabilité de ces circuits de carrières souterraines conduisit Louis XVI à ordonner leur fermeture et la création des ossuaires. Le reste de ces galeries est aujourd’hui fréquenté par quelques visiteurs qui ont leurs habitudes et leurs codes. Ils entretiennent pour la plupart une relation particulière avec ces lieux dont ils se passionnent. Certains peuvent même passer plusieurs jours sous terre.
Le réseau est en perpétuelle transformation : éboulements, nouvelles galeries, chatières et boyaux sont creusés à la main dans les enchevêtrements par les « cataphiles ». Il n’est pas rare de croiser des gens de tous âges et de toutes origines sociales ou économiques dans ce lacis perdu où chacun peut être qui il veut.
Guillaume DURON
Crédit image : Rolando Cruz