Les incendies australiens: un désastre écologique
L’Australie est habituée aux feux de brousse, pourtant depuis octobre les incendies ont pris une ampleur considérable. Le brasier, difficile à maîtriser, ne semble pas en voie d’extinction. La superficie brûlée s’élève déjà à 11 millions d’hectares, soit un peu plus que la Corée du Sud. Le bilan est de 28 morts, sans compter les évacuations d’urgence. Dans le Sud-Est, ce sont près de 100 000 personnes qui ont dû être déplacées. En plus du bilan humain, c’est la biodiversité tout entière du pays qui est mise en péril. Selon WWF, près d’1.25 milliards d’animaux ont péri, parmi eux les koalas sont les premières victimes avec un nombre de survivants s’élevant uniquement à 5
L’ampleur des incendies doit être analysée à la lumière d’une conjonction de plusieurs facteurs naturels. L’année 2019 est une année de records pour l’île-continent. En effet, elle a connu son année la plus chaude et la plus sèche, battant le record mondial de température en décembre, avec un pic de 49.9 degrés à Nullarbor et enregistrant en moyenne 40
Les conditions climatiques sont défavorables, c’est un fait, mais la gestion de la crise par le gouvernement australien fait aussi débat . Alors que son pays s’embrasait en décembre, le Premier ministre, Scott Morrison, se trouvait à Honolulu pour prendre quelques jours de vacances. Contraint de revenir au pays sous la pression publique, ses rares apparitions auprès des populations sinistrées suscitent colère et indignation. Ce n’est que début janvier que celui-ci annonce le déploiement de 3 000 réservistes. Mais le cœur de la contestation réside surtout en la politique forestière du pays jugée inadaptée par sa négligence envers la prévention des incendies. Certains, à l’instar de Laurent Alexandre, essayiste français, vont même jusqu’à mettre en cause les politiques environnementales qui, selon eux, créeraient des difficultés d’accès aux zones touchées. À ce titre, est évoquée, la politique du gouvernement Carr qui dès 1995 favorise l’augmentation du nombre de parcs nationaux, des aires protégées dont l’accès est, aujourd’hui, rendu difficile. Le durcissement de la réglementation concernant les brûlis contrôlés a réduit considérablement l’usage de cette pratique. De fait pour procéder à ses incendies préventifs un ensemble de paramètres doit être réunis, en leur absence et par mesure de sécurité ils ne sont pas déclenchés. De ce fait, cette mauvaise gestion de la politique forestière, au sein des hautes sphères de l’Etat, entraîne alors une charge importante de travail souvent déléguée à ceux qui luttent en première ligne : les pompiers. Les citoyens s’indignent, la communauté internationale s’émeut. Les élans de solidarité se multiplient à travers le monde. Celle-ci vient des États d’abord. Début octobre, la Nouvelle-Zélande avait envoyé 157 pompiers et autres personnels, en décembre c’était au tour des forces américaines et canadiennes d’intervenir. S’y ajoutent également les initiatives des célébrités. Celeste Barber comédienne australienne a pu ainsi récolter 20 millions d’euros. À ses côtés, Nicole Kidman et Pink ont fait le généreux don de 500 000 dollars chacune. En réalité, le brasier australien n’est pas un événement isolé. En 2019, les incendies se sont multipliés, au Portugal, en Amazonie ou encore en Sibérie, dont le phénomène fut analogue à l’Australie avec près de 12 millions d’hectares de forêts partis en fumée. Pourtant, l’exposition médiatique des feux australiens et plus particulièrement le rôle des images marquent une différence face aux phénomènes similaires. Les villes enfumées, les habitants réfugiés, les animaux entrant dans les villes sont autant d’images illustrant la proximité entre le milieu humain et la nature, et par là-même l’impossibilité pour les Hommes de faire abstraction de la catastrophe. Le spécialiste de l’histoire visuelle, André Gunthert, souligne le fait que si les images du réchauffement climatique nous sont déjà parvenues auparavant, ces récents incendies relèvent d’une prise de conscience nouvelle puisque les décors habituellement reculés de la banquise ou des forêts profondes ont laissé place, cette fois-ci, à un paysage urbain. Cette image digne d’une fiction est désormais une réalité palpable, immédiate, elle n’est plus lointaine mais s’impose aux Hommes qui ne peuvent plus détourner les yeux. Une nouvelle iconographie est née. Les flammes finiront-elles par s’éteindre ? L’espoir renaît. Depuis le jeudi 16 janvier, la pluie inespérée tombe enfin. D’ailleurs, les précipitations sont tellement importantes qu’elles causent des inondations. Cette abondance d’eau permet un répit aux soldats du feu mais il est encore difficile de dire si elle permettra d’éteindre l’ensemble des incendies. Marion SAUTRON sources : L’Australie brûle, mais pourquoi ?
Quels sont les responsables ?
Un événement qui suscite une mobilisation à échelle internationale
Vers une nouvelle iconographie du réchauffement climatique