DOUBLE CASQUETTE : Vimala, étudiante et sportive de haut niveau

En ce mois de novembre 2020, Alma Mater vous propose de suivre le parcours d’étudiants à double casquette. Leur quotidien hors du commun vous permettra de découvrir comment il est possible de concilier vie professionnelle et études, comment vivre de sa passion tout en suivant un cursus scolaire. Pour poursuivre sur cette mini série, nous avons rencontré Vimala Heriau, étudiante et joueuse de badminton semi-professionnelle, championne de France 2018 et 2020. 

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? 

Bonjour. Je m’appelle Vimala Heriau, j’ai 21 ans et je suis étudiante en troisième année de licence monodisciplinaire Physique en Parcours à Distance (PAD) à Sorbonne Université. En parallèle, je suis sportive de haut niveau en badminton, en double dame et double mixte. Plus précisément, je joue en couple, avec une fille ou avec un garçon. Cela fait 5 ans que je suis en internat à I’Institut National du Sport de l’Expertise et de la Performance (INSEP) à Vincennes ; c’est le plus grand établissement français de sportifs de haut niveau. Je suis semi-professionnelle et je suis donc rémunérée pour jouer au badminton, notamment lors de mes compétitions. 

©Vimala Heriau

Comment en êtes-vous arrivée à ce parcours ? 

Je fais des études à côté de ma vie de sportive car je crois qu’après ma carrière, je souhaiterais travailler. La physique est un domaine qui m’a toujours plu, et j’aimerais réellement continuer dans cette voie ; mais uniquement après ma carrière de sportive. Pour le moment, je me consacre entièrement au badminton tant que je le peux. Le badminton est une discipline moins récompensée financièrement, par rapport au tennis et au football par exemple. De plus, les femmes le sont encore moins par rapport aux hommes. Les joueurs professionnels partent  à la  retraite très tôt, c’est-à-dire, vers l’âge de 30 ans environ ; en d’autres termes, ils mettent fin à leur carrière de sportif. Vivre uniquement de ma passion ne me suffirait pas pour subvenir à mes besoins. 


Est-ce que votre entourage a joué un rôle dans cette décision ?

Je joue au badminton depuis mes cinq ans. Après le baccalauréat, j’ai fait le choix de devenir professionnelle ; c’est à la majorité qu’on le décide [de suivre une carrière professionnelle ou non]. Sans hésitation, je me suis lancée dans ma carrière de joueuse de haut niveau. Comme on dit : “C’est de famille !” ; ma mère et mon frère en ont fait. D’ailleurs mon frère a lui aussi été en équipe de France masculine de badminton. Depuis mes 12 ans, je suis en internat sport-étude, je ne vis plus avec ma famille depuis très longtemps. Cela n’a pas surpris mon entourage, bien au contraire. 

Je peux aller voir ma famille, ce n’est pas un souci. Je ne suis pas loin d’eux, je vais les voir quand je le peux. Bien sûr, je connais des sportifs qui ne sont pas dans le même cas et qui habitent loin, mais on sait qu’on doit faire des concessions et des sacrifices et on en connaît la raison.

Arrivez-vous à vous organiser de manière à ce qu’il soit possible pour vous, à la fois, d’étudier et d’exercer votre activité de joueuse professionnelle ? N’est-ce pas parfois compliqué ?

A Sorbonne Université, il est possible d’étaler ses études si on le souhaite, c’est donc ce que j’ai fait. J’ai commencé en licence 1 PCGI (Physique Chimie Géosciences et Ingénierie) que j’ai séparé en deux ans. J’ai ensuite pris la décision de faire une licence mono-physique ; la licence mono-disciplinaire étant la plus simple pour moi, en raison de mon activité de joueuse professionnelle. Ainsi ma deuxième année de licence s’est aussi étalée sur deux ans. Ayant moins de compétitions cette année, à cause de la situation sanitaire, je travaille ma troisième année en un an seulement. Ma licence a donc duré cinq ans au lieu de trois. De la même façon, je pense faire mon master en plusieurs années.

Mes entraînements ont lieu du lundi au vendredi. Le samedi et le  dimanche, je suis en compétition ou en week-end. Sans compter les interclubs (compétition entre clubs), nous avons quinze compétitions échelonnées sur toute l’année de janvier à décembre, et deux semaines de vacances l’été. J’essaie d’organiser mon emploi du temps sportif et universitaire. Dès que j’ai du temps libre — entre les entraînements ou le soir, dans les transports en direction des compétitions (trains ou avions) —, je me mets au travail entre deux et trois heures par jour. Je dois passer les contrôles continus et les examens finaux en présentiel. De plus, je suis obligée d’être à la faculté deux semaines dans l’année pour les travaux pratiques en présentiel. 

Vos titres et vos victoires ont-ils changé quelque chose à vos études ?

Je suis championne de France 2018 et 2020, ainsi que dans le top 60 mondial en double dame. C’est lors de petits tournois en Europe, puis à l’international, qu’on gagne des points, ce qui permet donc de monter en grade. Je n’ai pas l’impression de me sentir différente dans mes études. Peu importe notre vie privée, on ne sera pas traité différemment par rapport à la faculté.

En parlez-vous autour de vous à la fac ou restez-vous discrète à ce sujet ? 

Non, je ne suis pas discrète par rapport à ce sujet. J’en parle avec mes camarades et d’ailleurs ils m’ont beaucoup épaulée en me passant par exemple les cours que je manquais. 

Comment faites-vous depuis la crise sanitaire ? Avez-vous dû prendre des mesures par rapport à votre activité sportive de haut niveau ? 

La COVID empêche de nombreuses compétitions, beaucoup ont été annulées. Pour cette fin d’année, je n’en ai que deux. Je vais partir en Allemagne le mardi 27 octobre pour un tournoi international pour le classement mondial. C’est pour cela que je fais très attention et ne prends pas de risques. Si on a le Coronavirus, on doit se confiner, comme tout le monde.

Connaissez-vous d’autres sportifs de haut niveau qui étudient comme vous  ?

Ma coéquipière de double dame, Margot Lambert, est à Sorbonne Université également. Je connais pas mal de joueurs qui font des études à côté de leur vie de sportif professionnel. D’ailleurs, l’INSEP est en partenariat avec Sorbonne Université.

Quels conseils donneriez-vous à un.e jeune sportif.ve de haut niveau qui souhaiterait suivre un cursus universitaire ?

C’est complètement possible. Plusieurs établissements d’études supérieures proposent des parcours à distance, des aménagements d’emplois du temps comme à Sorbonne Université par exemple. Désirant rester en région parisienne, Sorbonne Université était la seule faculté qui m’intéressait et proposait un emploi du temps aménagé et une licence étalée sur plusieurs années ; c’est pour cette raison que je m’y suis inscrite. C’est avant tout un engagement et des sacrifices. Il ne faut pas prendre ça à la légère et être conscient de ce que cela implique, mais à la faculté des personnes sont là pour nous suivre et nous aider. 

Propos recueillis par Garance SAUDERAIS

Couverture : ©Vimala Heriau

Un grand merci à Vimala Heriau d’avoir accepté notre interview pour Alma Mater qui lui souhaite bonne chance pour ses compétitions à venir et une carrière pleine de réussites et de victoires ! 

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