Depuis les années 2010, l’inquiétude des populations face à la crise écologique n’a cessé de s’accroître, entraînant l’émergence de différents mouvements, afin de lutter et de sensibiliser à la cause climatique. Cette prise de conscience collective, grandement portée par les voix des jeunes générations, se traduit par diverses actions, prouvant qu’il est possible de lutter à toutes les échelles. Les pratiques artistiques, comme la peinture, la photographie, la sculpture deviennent alors, eux aussi, des outils, des armes de sensibilisation et d’alerte face à la crise écologique, et nous avons décidé de nous intéresser aux différentes formes que peut prendre cet art engagé.
Nous avons, en premier lieu, des activistes, qui utilisent l’art comme un outil citoyen, afin de faire passer des messages, d’alerter, voire choquer leur public. Certains, comme l’artiste américaine Jenny Kendler (1980- ), passent par la sculpture. Un de ses projets les plus connus s’intitule Lounging Through the Flood (Se Prélasser Pendant l’Inondation) en 2019. Il s’agit d’une installation flottante, faite de bouées, placée entre le fleuve du Mississippi et la rivière de l’Ohio, un lieu particulièrement sujet à la montée des eaux. D’autres formes d’art, comme la photographie, permettent aussi de transmettre cet engagement climatique. Par exemple, le photographe islandais Ragnar Axelsson (1958- ), représente à travers ses clichés l’importance du dérèglement climatique sur le territoire de l’Arctique. Enfin, pour ce qui est de la peinture, nous pouvons citer le célèbre grapheur et activiste américain Banksy. Nous avons par exemple son œuvre I don’t believe in global warming (Je ne crois pas au changement climatique), située sur un mur du Regent’s Canal à Londres.
Mais l’art peut également œuvrer dans un cadre plus global. Ainsi, voient le jour, de plus en plus d’expositions autour de la sensibilisation écologique.
Certaines vont avoir pour objectif de dénoncer l’état de destruction de l’environnement qui nous entoure. Il y a, par exemple, l’exposition « Urgence climatique », à la Cité des sciences et de l’industrie de Paris, qui offre un parcours immersif au milieu d’œuvres photographiques dénonçant la crise environnementale. Certaines vont plutôt chercher à transmettre un message porteur d’espoir : montrer qu’il est toujours possible de créer un meilleur futur si nous agissons maintenant. C’est le cas de l’exposition « Antéfutur », mise en place par le CAPC (musée des Arts Contemporains de Bordeaux), où plusieurs artistes ont été invités à créer des œuvres alternatives afin de contrer les visions apocalyptiques que nous offrent la situation climatique actuelle. D’autres vont plutôt chercher à dialoguer avec leur public, en leur offrant des visions passées et actuelles de l’environnement, afin de les inviter à se poser des questions sur ce qui les entoure. L’exposition « 100 œuvres qui racontent le climat » au musée d’Orsay, à Paris, met en scène sculptures et peintures, d’époques variées, donnant ainsi l’opportunité de réaliser un parcours à travers ces diverses représentations de l’environnement.
Enfin, certains artistes vont décider de modifier l’art lui-même, pour le rendre plus écologique, créant une nouvelle forme d’art : l’éco-art. Nous pouvons citer l’exemple du « Green Art », dont l’intention est d’utiliser des matériaux non toxiques pour l’environnement, comme le carton, très pratique pour les sculptures, afin de promouvoir la préservation des espaces naturels, au travers d’œuvres souvent éphémères. Nous pouvons également parler de « l’Ecovention », un mouvement visant à l’utilisation de l’art comme outil permettant la restauration d’espaces naturels endommagés et pollués. Nous avons l’exemple de Stacy Levy (1960- ), sculptrice américaine, qui, avec son projet « Spiral Wetland », a permis de restaurer la vie marine du lac Fayetteville aux États-Unis, en construisant des zones marécageuses en forme de spirales, qui permettent d’assainir l’eau et de restaurer la biodiversité de ce lieu.
Si les arts peuvent paraître au premier abord comme des disciplines visant à la création du beau, ils peuvent représenter beaucoup plus. L’art est depuis toujours utilisé pour faire passer des messages, alerter, sensibiliser les populations face aux enjeux sociaux et politiques, mais aussi, et de plus en plus, face aux enjeux écologiques. L’art permet tout autant de dénoncer la crise climatique que de proposer des solutions pour un avenir plus durable, avec une sensibilité artistique qui a pour but de faire s’interroger le public sur les questions environnementales et sur les actions qu’il est possible d’entreprendre pour améliorer les conditions climatiques. L’art n’est donc pas qu’un simple outil, il s’agit d’un moteur de changement, qui permet de véhiculer des messages, de défendre des causes et de rappeler les effets nocifs des activités humaines sur Terre.
Orane Mathey-Nuez