#BalanceTonYoutubeur

Pourquoi il faut arrêter la culpabilisation des victimes

Si vous étiez sur Twitter cet été vous n’êtes probablement pas passés à côté : le YouTuber Squeezie a dénoncé d’un tweet « Les YouTubers qui profitent de la vulnérabilité psychologique de jeunes abonnées pour obtenir des rapports sexuels ». Avec plus de 48 000 retweets, son message a suscité de multiples réactions. Un #BalanceTonYoutubeur a ouvert la voie à de nombreux témoignages de jeunes filles, souvent mineures, qui disent avoir été victimes de ce type de pratiques.

Face à cela, beaucoup de voix se sont élevées pour remettre en question ces déclarations et crier au fake. Des réactions que l’on observe d’ailleurs systématiquement lorsque la parole se libère sur des questions d’agressions ou d’abus sexuels.

En réalité, on dénombre 2 à 8% de fausses déclarations de viol. Or ce chiffre comprend également les erreurs d’agresseurs, les dépositions dont un détail est incorrect et les plaintes retirées (même si rien ne prouve qu’elles soient fausses). À titre de comparaison,
on estime à 10% le nombre de fausses déclarations de vol.

Pourquoi ne remet-on pas systématiquement en cause la parole des personnes qui dénoncent un vol comme c’est le cas pour les agressions sexuelles ?

Nous vivons dans une société imprégnée d’une culture sexiste qui nous formate, de façon souvent inconsciente, à remettre instinctivement en question la parole d’une victime de viol, d’agression ou d’abus, à la décrédibiliser en se servant par exemple de son mode de vie ou de sa façon d’être. C’est le fameux « Oui mais tu étais habillée comment ? ». Plus encore, dans l’imaginaire collectif, les agresseurs sexuels sortent tout droit d’un film d’horreur et ne fréquentent que des ruelles sombres. Dans les faits, 3/4 des agresseurs sexuels sont des proches de la victime.

Avec des représentations aussi éloignées de la réalité, il devient presque impossible d’imaginer que son YouTuber préféré puisse accomplir de tels actes.

Bien sûr il ne s’agit pas de remettre en cause la présomption d’innocence. Soyez rassurés, les tribunaux ne s’appuient pas sur des RT ou sur le commentaire de licornedu42 pour mettre quelqu’un en prison (s’il était nécessaire de le préciser).

Néanmoins, remettre systématiquement en cause la parole de celles qui osent parler, c’est contribuer à réduire au silence les victimes d’abus dans un contexte où très peu d’entre elles osent parler. En effet, seuls 10 % des femmes victimes de viol portent plainte, et seuls 3 % des viols débouchent sur un procès en cour d’assises, ce qui en fait le crime le moins puni.

Nicolas BENOIT

Illustration : Samy DARIN

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