Une volonté de s’ouvrir ou de s’imposer ?
Estimée à quelques 1000 milliards de dollars d’investissements, la nouvelle route de la soie est un projet pharaonique de près de 10000 kilomètres de chantiers à travers l’Europe et l’Asie centrale et du Nord par la voie terrestre, et aussi en Afrique et au Proche et Moyen-Orient par la voie maritime. À travers ce projet commencé en 2013, la Chine vise à rendre justice à son nom : « l’Empire du Milieu ». Au cours des premier et deuxième siècles avant notre ère, la route de la soie était une chaîne de routes commerciales reliant l’Asie à l’Europe. Elle tire son nom d’une des ressources les plus précieuses et recherchées de l’époque. Tout comme l’ancienne, cette nouvelle route est d’abord animée par un intérêt économique mais aussi par une volonté de favoriser les échanges culturels, artisanaux et scientifiques ; ainsi, la Chine ne manque pas l’opportunité d’étendre sa mainmise et son influence.
Même si ce projet se polarise d’abord autour des intérêts de la Chine, il représente aussi une occasion pour les pays d’Asie centrale de se retrouver sur la carte mondiale. En effet, des pays comme l’Ouzbékistan et le Tadjikistan, longtemps restés en marge de la mondialisation, peuvent profiter d’une ouverture économique et touristique importante. L’Asie centrale est en effet riche d’une histoire, d’une culture et d’une géographie marquées par de nombreux empires comme les Xiongnu, les Mongols ou l’Union Soviétique. On peut citer l’exemple de Boukhara en Ouzbékistan, ville-musée comptant non loin de 140 monuments architecturaux.
Cependant, il faut noter que la Chine a signé des accords économiques et diplomatiques avec des pays politiquement et économiquement instables, et d’autres ne respectant pas les droits de l’Homme, comme l’Arabie Saoudite et la Biélorussie.
De plus, la Chine est moins regardante que d’autres pays – notamment de l’UE – concernant les capacités de remboursement des pays auxquels elle prête des milliards pour construire les aménagements de cette nouvelle route (les routes, les ports…). Ainsi, 8 pays sont considérés comme incapables de rembourser la Chine. Le Sri Lanka, par exemple, s’est fait financer la construction d’un port et a dû le céder à la Chine pour un bail de 99 ans ; la même situation s’est reproduite ailleurs comme pour le port Gwadar au Pakistan.
Plus de 60 pays ont déjà agréé à ce projet audacieux et Pékin prévoit d’investir dans 68 pays représentant 65% de la population mondiale. La nouvelle route de la soie pourrait ainsi renforcer le statut de la Chine comme superpuissance mondiale. La mondialisation atteindrait un stade sans précédent, et des pays d’Afrique, d’Europe et d’Asie pourraient être sous l’emprise d’une forme de néocolonialisme avec le debt trap chinois.
Ashwin Soobhug