La chirurgie esthétique-réparatrice, une longue recherche centenaire  

Quand on parle de chirurgie, on pense tout de suite à la chirurgie esthétique. En effet, de nos jours, les publicités de beauté sont omniprésentes dans notre quotidien. Tout est fait pour nous pousser à paraître toujours plus jeune, notamment en ayant recours à la chirurgie esthétique. Mais saviez-vous que cette chirurgie était l’aboutissement d’un siècle de recherches dans le domaine de la chirurgie réparatrice ? Alma Mater vous propose de découvrir l’histoire méconnue de cette discipline. C’est avant tout l’histoire d’une recherche qui avait pour but de sauver des vies… 

1914 : la naissance d’une nouvelle spécialité médicale

En 1914 éclate la Première Guerre mondiale. Extrêmement meurtrier, ce conflit a mutilé les hommes comme aucune guerre n’en avait été capable auparavant. Au sortir de celle-ci , on compte pas moins de 15 000 Gueules Cassées. Malgré elles, ces Gueules Cassées vont impulser le début de la chirurgie réparatrice.

    Au début de la guerre, les connaissances en termes de chirurgie réparatrice avoisinent le néant. Seules quelques tentatives pour recoller des oreilles ou réduire le nez sont attestées avant 1914. Au commencement du conflit, certains chirurgiens se mettent au service des Gueules Cassées et de la recherche médicale. C’est par exemple le cas du Professeur Morestin et de la doctoresse Suzanne Noël, à l’hôpital du Val-de-Grâce, à Paris. C’est ensemble qu’ils enquêtent sur de nouvelles techniques de greffes pour redonner un visage humain à leurs blessés.

Durant la guerre, la chirurgie réparatrice fait un bond de géant. Greffes osseuses, cartilagineuses, de peau, autoplasties, techniques qui utilisent la mobilité des parties molles proches de la mutilation pour s’y transférer ; les chirurgiens innovent. Pour trouver des greffons, on a de l’imagination ! Beaucoup proviennent d’animaux, d’autres d’êtres-humains, d’autres encore du patient lui-même. Mais il faut également noter les nombreux rejets de greffes qu’il y a pu avoir. Les médecins tâtonnent, se trompent. Ils manquent de connaissances. Néanmoins, à la fin de la guerre, les progrès sont saisissants et miraculeux. La recherche a porté ses fruits : de trous béants, les médecins ont réussi à reconstituer des visages.

Suzanne Noël : pionnière de la chirurgie esthétique

Mais l’aventure ne s’arrête pas là ! Dans son cabinet, Suzanne Noël applique les techniques trouvées durant la Première Guerre mondiale à la chirurgie réparatrice. Dès les années 1920, elle pratique les premiers liftings. En effet, à son époque, la beauté est un capital qui permet plus facilement aux femmes de trouver du travail. En innovant encore et encore dans ce domaine, la doctoresse cherche à rendre ce capital aux femmes qui vieillissent. Dans les années 1930 sont inventées les premières prothèses mammaires. Une utilisation notable de Suzanne Noël de ces implants s’est déroulée sur une jeune fille avec un dimorphisme mammaire très marqué.

Les années 1950 : un tournant dans l’innovation chirurgicale

La Seconde Guerre mondiale et les guerres de décolonisation apportent aussi leur lot de blessés de la face. C’est encore une occasion pour enquêter et améliorer les techniques chirurgicales afin de rendre un visage aux nouvelles Gueules Cassées. Les techniques de greffes de peau sont améliorées. Mais c’est en 1958 que la chirurgie réparatrice connaît un tournant. En effet, cette date correspond à une découverte médicale majeure : celle  du Complexe Majeur d’Histocompatibilité (CMH). Il s’agit d’un système de reconnaissance du soi et du non-soi. Tout ce qui ne correspond pas au soi est repéré par le CMH puis rejeté de l’organisme. Dès lors, on comprend les rejets de greffe qui ont pu avoir lieu. A partir de là, les greffons sont sélectionnés avec bien plus de minutie. On arrête avec les greffons provenant d’animaux et on vérifie la compatibilité entre le donneur et le receveur. 

Des années 1950 jusqu’à nos jours, les techniques de chirurgie esthétique-réparatrice continuent de s’améliorer. Elles gagnent en précision : des techniques spécifiques sont trouvées pour des régions localisées du corps humain. Aujourd’hui, la recherche continue encore, notamment via la fondation des Gueules Cassées. Créée en 2001, elle finance des médecins-chercheurs qui s’intéressent aux traumatismes du visage, de la tête ou aux malformations. La chirurgie réparatrice n’a donc pas fini de révéler tous ses secrets… 

Lucie BRICKA

Sources :

Les gueules cassées : les blessés de la face de la Grande Guerre, Sophie Delaporte 

La prise en charge des blessés de la face lors de la Grande Guerre (1914-1918) : de la blessure au retour à la vie civile, thèse de Mathieu Duvnjak

A mains nues, Leïla Slimani et Clément Oubrerie 

https://www.gueules-cassees.asso.fr/la-fondation-des-gueules-cassees–_r_103.html

Image : ©Pixabay

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