Impossible de traiter notre thème du mois sans s’attarder le temps d’un article sur l’emblématique chanson « Un autre monde » du groupe de rock français Téléphone. Vous avez sûrement déjà entendu ces premières paroles énigmatiques : « Je rêvais d’un autre monde, où la terre serait ronde… ». Retour sur cet énorme succès des années 1980.
Avant tout un album à la place particulière
Au cas où vous seriez passé à côté de ce groupe de rock culte, Téléphone est un groupe français des années 80 composé de Jean-Louis Aubert, Louis Bertignac, Corinne Marienneau et Richard Kolinka. Fort de son succès, c’est le deuxième groupe de rock français, après Indochine, à avoir vendu le plus de disques avec six millions d’exemplaires écoulés au total. Un autre monde est le cinquième et dernier album du groupe, sorti en 1984, deux ans après lequel ils finissent pas se séparer. Un album singulier donc, par son contexte, mais aussi par sa production. En effet, à cette période, les tensions sont de plus en plus fréquentes dans le groupe. Ce dernier décide alors de changer de producteur pour cet album. Après de longues discussions, c’est finalement Glyn Johns – une légende du rock, connu pour avoir produit entre autres Les Beatles, Eagles ou encore Les Rolling Stones – qui est chargé de produire l’album. Une fois le producteur choisi, ce dernier est enregistré et mixé en un temps record : quatre semaines (dérisoire comparé aux longs mois de production de l’album précédent Dure Limite). Si le début de l’album est compliqué, les chiffres de vente explosent rapidement (800 000 exemplaires au total), notamment grâce à la chanson phare de l’album : « Un autre monde »…
Le succès d’« Un autre monde »
La chanson reste 25 semaines au Top 50 français, où elle atteint la cinquième position. Elle a connu de nombreuses reprises, entre autres par Les Enfoirés, Christophe Maé, Superbus, ou encore Yseult plus récemment. Mais comment expliquer son succès ?
Tout simplement d’abord, la mélodie très entraînante de la chanson, du pur rock and roll, qui a de quoi vous donner la pêche dès le matin. Pourtant, on est loin de se douter de cela en écoutant le début : il s’écoule en effet 28 secondes très calmes d’introduction à la guitare seule, avant le double coup de caisse claire du batteur Richard Kolinka qui lance définitivement le ton et entraîne la chanson dans un rythme endiablé. La voix éraillée de Jean-Louis Aubert participe bien sûr également à donner son cachet si particulier à la chanson.
Mais aussi des paroles énigmatiques avec des images poétiques, frôlant parfois le surréalisme – on pense notamment à « la lune […] blonde ». Mais aussi l’expression d’émotions propres à la jeunesse qui peuvent parler à tous, encore aujourd’hui : volonté de changement radical et de rébellion (« Je voulais tout foutre en l’air »), refus du matérialisme (« une terre moins terre à terre »). On aboutit finalement à une forme d’indétermination car le monde utopique rêvé était en fait la réalité : « je rêvais réalité », confirmé plus tard par « Oui, je rêvais de notre monde », jouant sur les sonorités du titre de la chanson). Mais cette confusion est peut-être une façon de dire que le rêve a sa place dans la réalité, et vice-versa. Les interprétations sont multiples !
En plus de cela, la chanson est assortie d’un clip qui mérite le coup d’œil. Des images en noir et blanc montrent alternativement un petit garçon, caméra à la main, qui parcourt le métro parisien, et des séquences du groupe en train de jouer, avec de l’énergie à revendre. Réalisé par Jean-Baptiste Mondino et produit par Alain Massiot, c’est un clip à l’esthétique très marquée, sombre et pourtant très poétique.
Téléphone n’est d’ailleurs pas le seul groupe à chanter l’utopie d’un nouveau monde, et si vous écoutiez « Monde Nouveau » de Feu Chatterton ?
Marjolaine Milon
Sources :
http://www.clgpicasso.fr/la-picachanson-n6-un-autre-monde/
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Un_autre_monde_(chanson)
Image : © Couverture de l’album Un autre monde, Téléphone, 1984