Ces dernières décennies, la communauté scientifique a observé une eutrophisation1 généralisée des eaux douces et salées. Cette forme de pollution est causée par une accumulation excessive de nutriments (phosphore, azote) facilement assimilables par les micro-organismes. Si ce phénomène se produit naturellement sur des millénaires, l’apport d’effluents domestiques, agricoles ou industriels l’accélère. L’une des principales conséquences est la prolifération rapide des cyanobactéries, des bactéries photosynthétiques apparues il y a plus de 3 milliards d’années.
Lors de la saison estivale, l’élévation des températures, la baisse du niveau et du débit des eaux, ainsi que l’accumulation de nutriments, favorisent ces proliférations. Les satellites permettent désormais d’observer leur impact à l’échelle mondiale. Elles peuvent s’étendre sur plus de 200 000 km² comme en mer Baltique le 28 juillet 2019 (NASA Ocean Color). Au début, le nombre de cyanobactéries se multiplie rapidement jusqu’à atteindre parfois plusieurs millions de cellules par millilitre d’eau et cela va induire une très forte diminution de la concentration en oxygène dissous, créant parfois des ?« zones mortes » où les animaux aquatiques suffoquent.
À la fin de leur prolifération, les cyanobactéries relâchent d’énormes quantités de toxines dans l’eau. Seulement trois cyanotoxines sont soumises à des réglementations strictes concernant l’eau potable et les zones récréatives (Rapport ANSES, 2020). Elles peuvent être neurotoxiques, cancérigènes, hépatotoxiques, tératogènes (causant des malformations) et même mortelles. Les premières victimes sont les animaux aquatiques, mais aussi les animaux domestiques et les humains. Un exemple tragique est celui de trois chiens décédés après avoir nagé près d’un affluent de la Garonne en 2023 (Ouest France). Par ailleurs, les piscicultures, souvent installées dans des plans d’eau stagnants contribuent à la pollution des eaux et favorisent les proliférations de cyanobactéries. Les poissons élevés dans ces conditions peuvent être contaminés, rendant leur chair impropre à la consommation.
La lutte contre leur prolifération passe par une meilleure gestion des eaux et une réduction des polluants. Plutôt que de les voir comme un ennemi absolu, il est essentiel de mieux comprendre ces organismes qui sont indispensables au maintien des écosystèmes.
Maiwenn Le Meur
Note
- Processus d’accumulation de nutriments dans un écosystème donné. ↩︎
Sources
ANSES, « Évaluation des risques liés aux cyanobactéries et leurs toxines dans les eaux douces », Avis de l’Anses Rapport d’expertise collective, mai 2020, URL : https://www.anses.fr/fr/system/files/EAUX2016SA0165Ra.pdf
GUILLAS Nicolas, « Comment expliquer le phénomène des chiens intoxiqués par des cyanobactéries dans des rivières ? », Ouest-France, 12 septembre 2023, URL : https://www.ouest-france.fr/environnement/pollution/comment-expliquer-le-phenomene-des-chiens-intoxiques-par-des-cyanobacteries-dans-des-rivieres-b9d554ee-4bf1-11ee-b625-09c8dfacf813 [consulté le : 08 mars 2025]
Sitographie
s.n., « Cyanobactéries de la mer Baltique », NASA Ocean Color, 26 juillet 2019, URL : https://oceancolor.gsfc.nasa.gov/gallery/677/ [consulté le 08 mars 2025]
Pour voir des proliférations de cyanobactéries visibles par satellite : Landsat Image Gallery, URL : https://landsat.visibleearth.nasa.gov/search.php?cx=002358070019171462865%3Ajkcajjtgk4q&cof=FORID%3A9&q=baltic&sa=recherche
Crédits photographiques : Cyanobactéries au barrage de Haute-Vilaine, licence Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, Wikimedia, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Cyanobact%C3%A9ries_au_barrage_de_Haute-Vilaine.JPG.