Les correspondances d’artistes jouent un rôle crucial dans la compréhension des œuvres et des créateurs eux-mêmes. Nous pouvons citer l’exemple des nombreuses lettres que Vincent van Gogh écrivait à son frère Théo. Ces dernières permettent d’obtenir une vision globale de l’environnement artistique bouillonnant dans lequel le peintre néerlandais vivait, notamment à Paris.
La quête de cohésion artistique
La correspondance abondante de l’impressionniste Camille Pissarro nous renseigne notamment sur les moments de doutes artistiques qu’il traverse. Dans une lettre écrite à son fils Lucien depuis Rouen le 20 novembre 1883, il déclare :
« Je viens de terminer ma série de peintures, je les regarde beaucoup ; moi-même qui les ai faites, je les trouve parfois horribles […] J’ai parfois des peurs horribles de retourner une toile, je crains toujours de trouver un monstre à la place du précieux joyau que je croyais avoir fait ! »
Grâce aux recherches de Bailly-Herzberg, historienne de l’art pictural du XIXe siècle, ces confidences tenues dans la sphère intime nous permettent de comprendre la relation que le peintre entretient avec ses œuvres et l’hésitation qui suit parfois leur achèvement.
La maladie chronique
Figure fondatrice de l’école de Barbizon, Jean-François Millet traverse de nombreuses phases durant lesquelles la maladie le frappe. Grâce aux travaux de Lepoittevin, ses lettres sont aujourd’hui publiées. L’année 1857, notamment, est ponctuée de nombreuses périodes migraineuses. Dans une lettre à Alfred Sensier, ami et critique d’art, datée du 9 décembre, Millet se livre :
« Mon affreuse migraine de dimanche ne s’est un peu calmée que bien avant dans la soirée […], j’ai fini par prendre du thé n’y pouvant plus tenir. Lundi j’étais presque invalide, mais pour me remettre j’eus hier mardi une seconde migraine un peu moins forte que celle de dimanche ; aujourd’hui je suis plus ou moins sur mes jambes. »
Malgré ses vives douleurs, Millet parvient à maintenir une production relativement stable et continue de vendre des œuvres.
Ces témoignages permettent de rentrer dans l’intimité des artistes et de suivre le développement de leur pensée. Ces correspondances donnent un aperçu partiel de la personnalité derrière l’esprit créateur, permettant de le rendre plus humain et davantage accessible au grand public.
Allison Caudron
Bibliographie :
- BAILLY-HERZBERG Janine, Correspondance de Camille Pissarro, Tome I, Presses Universitaires de France, 1980, p. 253.
- LEPOITTEVIN Lucien, Une chronique de l’amitié, correspondance intégrale du peintre Jean-François Millet, Le Vast : J. et L. Lepoittevin, 2005, p. 99, 113.
Crédits photo : Camille Pissarro, Portrait de l’artiste, 1873, Musée d’Orsay.