Étudier en Écosse : Les conséquences inattendues du Brexit pour les européens.

De nombreux bacheliers européens veulent étudier dans un pays anglophone mais ne peuvent pas s’offrir le luxe d’aller en Angleterre ou aux Etats-Unis, où les frais de scolarité peuvent s’élever à plusieurs dizaines de milliers d’euros. L’Écosse offrait une alternative intéressante aux jeunes européens. 

Un système éducatif réputé dans le monde 

L’Écosse n’est pas seulement réputée pour son whisky, ses paysages mystiques et sa musique folklorique, mais aussi pour l’excellent style de vie et la qualité de l’éducation supérieure. L’Université d’Edimbourg par exemple, au 32ème rang mondial du classement de Shanghaï en 2019, 5ème au Royaume-Uni, accueille des étudiants de plus de 140 nationalités différentes. Des alumnis de renoms ont foulé ses halls comme Charles Darwin, David Hume, Sir Walter Scott, Sir Arthur Conan Doyle, de même qu’une médaille Fields et 23 Prix Nobel.  

De plus, un autre avantage majeur est que le système d’éducation écossais assure une scolarité gratuite pour les étudiants d’Écosse et ceux de l’Union Européenne (UE). Ces étudiants, appelés des “home students”, ont leurs frais de scolarité intégralement pris en charge par le programme SAAS (Student Awards Agency for Scotland) pour leur premier diplôme. C’est aussi ce qui a attiré Romane, étudiante en physique à Edimbourg à l’université Heriot-Watt : « Je voulais étudier au Royaume-Uni sans devoir commencer ma vie avec des dettes pour payer mon éducation ». 

Les étudiants venant du reste du Royaume-Uni (« Rest of UK » ou “RUK”) doivent, eux, payer des frais s’élevant à plus de 10.000€, soit autant qu’en Grande-Bretagne. 

Enfin, les étudiants “internationaux”, donc ne venant ni de l’Union Européenne, ni du Royaume-Uni, doivent payer des frais encore plus excessifs, compris entre 12.000€ et 30.000€ 

Interrogés sur les tensions que peuvent créer ces différents statuts au sein de la communauté étudiante, Esther, en licence de criminologie et sociologie à l’université de Stirling, trouve « qu’il n’y a pas vraiment de disputes par rapport à cela car ce n’est pas de notre faute et les internationaux savent dans quoi ils s’engagent ». Romane partage cet avis même s’il est lui est déjà arrivée d’entendre des commentaires désagréables.

Dans tous les cas, le statut des européens va complètement changer avec la sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne…

Une terre d’étude pour les plus fortunés ? 

D’après “study.eu”, le site de réference pour l’éducation supérieure en Europe, les étudiants du continent seront catégorisés comme des “internationaux” et non plus comme des “home students” après le Brexit. En avril 2019, le gouvernement écossais a cependant confirmé que les étudiants européens ayant commencé leurs études en 2019 ne verront pas leurs frais de scolarité changer. Un système plus juste diront les étudiants britanniques, une perte de cohésion européenne diront d’autres. Même le programme Erasmus+, qui permet aux étudiants de faire des échanges dans ces universités et dont le Royaume-Uni est encore membre, risque aussi de devenir plus cher pour les européens, même si les modalités restent inchangées jusqu’en 2022. L’Écosse deviendra, comme le reste du Royaume-Uni, une terre d’études pour les plus fortunés. 

Plusieurs étudiants ont également témoigné du désaccord général dans le milieu universitaire. Philémon par exemple, étudiant en master d’Histoire à Paris Diderot, qui revient d’Erasmus. “D’après mes discussions avec les étudiants écossais et les remarques de certains professeurs, je peux dire que dans l’ensemble le Brexit est très mal vu à l’université, surtout à cause de ses conséquences dans le milieu de la recherche, notamment la perte des subventions européennes”.

PUBLI

L’indépendance pour contrer le Brexit ? 

La fin du traitement de faveur pour les européens ne pourrait être que de courte durée à cause du référendum sur l’indépendance. La réhabilitation du SAAS pour les étudiants européens figure en effet parmis les propositions du parti indépendantiste écossais (SNP), majoritaire à l’Assemblée d’Edimbourg. Leur dirigeante et ministre de l’Écosse, Nicola Sturgeon, a déjà réclamé l’organisation d’un second vote populaire à Londres pour réclamer l’indépendance. Le premier vote en 2014 s’était soldé d’un maintien dans le Royaume-Uni avec 55% des suffrages exprimés. L’un des arguments principaux du camp contre l’indépendance était le fait que l’Écosse devrait également quitter l’UE sans être assuré de pouvoir y adhérer par la suite. En effet, le Royaume-Uni aurait très certainement usé de son droit de veto pour bloquer la nouvelle adhésion de l’Écosse dans l’UE. 

La situation est tout autre aujourd’hui et c’est peut-être même la seule façon pour l’Écosse de rester dans l’UE. C’est aussi le constat de Romane : « La plupart des écossais voulaient rester dans l’UE, donc en ce moment le climat est assez tendu avec les multiples protestations pour l’indépendance, et la sensation d’être entraîné dans des décisions que les écossais ne partagent pas ». Esther estime que « les écossais se sentent impuissant face à l’Angleterre qui a toujours le dernier mot pour les décisions politiques. Stirling est une petite ville dont la circonscription électorale est indépendantiste depuis 2019 ».

La terre de William Wallace s’était en effet exprimé à 60% pour le maintien dans l’UE en 2016 lors du vote du Brexit. Mais alors que le rejet du Brexit fait plutôt l’unanimité au nord du mur d’Hadrien, l’indépendance reste une question ouverte, de même que le sort des étudiants européens voulant aller en Écosse dans le futur. 

Alexandre FOLLIOT

 

sources : 

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