Environnement et génétique

Le patrimoine génétique humain ne cesse d’évoluer. Les paramètres de cette évolution sont très nombreux, mais on peut distinguer deux grands mécanismes agissant selon des échelles de temps bien différentes : le brassage génétique entre différentes populations, et l’adaptation d’une population à un environnement donné. 

Sous le règne d’Ögödei, fils de Gengis Khan, se déroula la grande campagne d’Europe. De 1236 à 1293, les hordes mongoles ne cessent d’envahir l’Europe centrale, de la Russie à la Grèce. Les Mongols attaquent, pillent ou deviennent suzerains des différentes principautés. En 1480, Ivan III de Russie met fin à l’invasion des Mongols en Europe, et à un grand brassage de gènes qui aura duré plus de 200 ans. Derrière chaque grand événement historique se cache l’histoire de nombreuses recombinaisons génétiques qui résulte avant tout de l’adaptation de notre espèce à des environnements différents. 

En ce sens, les humains font exception parmi les mammifères, en ayant colonisé les environnements les plus extrêmes de la Terre, des plus hautes chaînes de montagnes aux îles éloignées de l’océan Pacifique.

Par exemple, la recherche sur les adaptations du peuple du Tibet à un environnement pauvre en oxygène a révélé une plus grande capacité pulmonaire et cardiaque, une meilleure oxygénation et une concentration en hémoglobine inférieure en seulement 3000 ans de présence sur ces hauts plateaux. Ce serait à la fois dû à la sélection naturelle et à l’expression d’un allèle du gène EPAS1 issu de l’hybridation entre l’Homme moderne et l’Homme de Denisova il y a environ 30.000 ans.

L’hypoxie, qui décrit ce manque d’apports en oxygène relativement aux besoins, est souvent un vecteur d’adaptation, comme chez le peuple des Bajau, qui sont près d’un million de « nomades de la mer » en Asie du Sud-Est. Depuis plus de 1000 ans, leur mode de vie de chasseurs-cueilleurs marins leur offre des capacités extraordinaires, plongeant à des profondeurs de plus de 70 m et passant 60% de leur journée de travail sous l’eau. Pour lutter contre l’hypoxie sous l’eau, les Bajau expriment le gène PDE10A qui augmente le niveau d’hormone thyroïdienne T4, faisant croître la taille de la rate. En effet, la contraction de la rate permet d’injecter des globules rouges oxygénés dans le système sanguin.

En plus de l’intérêt génétique, l’étude de l’hypoxie a de nombreuses applications médicales, notamment dans les soins intensifs et la tumorigenèse : de l’histoire-géographie à la médecine, il n’y a qu’un gène !

Depuis des centaines de milliers d’années, les comportements de notre espèce ont évolué en fonction de notre environnement. Aujourd’hui, la mondialisation interroge sur les nouveaux mécanismes de brassage génétique, et nous pousse à prendre en compte l’influence de nos comportements sur notre environnement.

 

Gustave MOREL

illustrateur : Jéremy TOURAILLE

Sources :

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