A Paris, que ce soit à l’angle d’une rue ou au beau milieu d’une place, votre œil a peut-être déjà été attiré par de gracieuses silhouettes d’un vert profond, offrant généreusement une eau claire et pure à tous les passants que la soif tiraillait. Il s’agit des fontaines Wallace, des structures en fonte sculptée qui parsèment la capitale.

Nymphes généreuses

Au nombre de 104, ces fontaines sont présentes un peu partout dans Paris, et c’est à cette ville que leur image est associée. Cependant, on peut en apercevoir certaines dans d’autres villes de France, comme Nantes. Elles se présentent sous la forme d’un socle cylindrique, au-dessus duquel se tiennent quatre statues de femmes soutenant un dôme et entourant le jet d’eau.

La plupart de ces œuvres sont d’un vert profond, en accord avec le style du mobilier urbain de l’époque et pour ne pas contraster avec les décors boisés des parcs et allées parisiennes. Toutefois, dans certains quartiers, on peut admirer des fontaines Wallace aux teintes rouges, blanches ou bleues.

Bien évidemment, une œuvre de cette envergure est obligatoirement truffée de symboles et de détails cachés, à tel point que tous les énumérer serait impossible – et surtout fort peu amusant : à vous de chercher ! Mais sachez cependant qu’elles sont toutes différentes, soit dans leur position, soit dans leur tenue ou leurs accessoires. Ces quatre femmes représentent les quatre saisons et les qualités prônées par Wallace, à savoir la bonté, la simplicité, la charité et la sobriété.

Autrefois, des gobelets en fer étaient reliés à la fontaine par des chaînettes, laissés à la disposition des utilisateurs, mais ceux-ci furent retirés des structures en 1952 par mesure d’hygiène. Précisons tout de même que l’eau est tout à fait potable, contrairement à ce que beaucoup pensent ! De plus, elles ne fonctionnent pas durant l’hiver – de novembre à mars, elles sont mises hors service en raison du gel qui risquerait d’entamer la plomberie interne.

Wallace a également conçu un autre modèle, dit « à colonnette » – les petites colonnes en question, beaucoup moins chères à réaliser que les cariatides, remplacent ces dernières – moins iconiques. Des trente fontaines Wallace à colonnette, il n’en reste plus que deux à Paris, l’une à l’avenue des Ternes, l’autre rue de Rémusat.

La lutte « anti-pochtron »

L’édification de ces fontaines remonte à l’époque de la guerre franco-prussienne menée par Napoléon III, aux alentours de 1870. En ce temps-là, la guerre fait des ravages et Paris est défigurée. Lorsque la situation se calme, de grands projets de reconstruction sont lancés – on peut citer la création du Sacré-Cœur ou des boulevards Raspail et Saint-Germain. De nombreux philanthropes financent ces projets, confiés à des ingénieurs, architectes et artistes.

Parmi ces philanthropes : Sir Richard Wallace, baronnet et membre du parlement britannique – sa tombe se trouve au cimetière du Père-Lachaise, où il y repose depuis 1890.

Après la guerre, l’eau se fait rare. Les installations l’amenant en ville, tels que les aqueducs, avaient été réduites en miettes par les bombardements. Le vin, plus accessible et moins cher, devient la boisson fétiche des démunis.

Pour préserver les Parisiens de l’ivrognerie et de l’insalubrité, tout en embellissant discrètement la Ville Lumière, Wallace a l’idée de concevoir des fontaines. Il engage aussitôt le sculpteur nantais Charles-Auguste Lebourg afin de l’aider à concrétiser son projet, et en résulte le croquis de ces fameuses cariatides. Il opte également pour de la fonte, matériau très à la mode car aisément malléable tout en étant peu cher.

La première fontaine fut inaugurée en août 1872, sur le boulevard de la Villette. Le succès est immédiat, et bien vite elles finissent par se répandre dans la ville. D’autres modèles voient le jour – sans pour autant être conçues par Wallace, bien qu’elles en portent tout de même le nom – et viennent peu à peu orner le décor urbain.

Recyclées en Portoloin

De nos jours, ces fontaines servent encore énormément aux sans-abris parisiens, qui peuvent venir s’y abreuver gratuitement.

De plus, depuis une vingtaine d’années, la réputation des fontaines Wallace a largement dépassé l’enceinte de la capitale. En effet, on en trouve des références dans nombre d’œuvres cinématographiques, notamment Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain (2001), où elles prêtent leur nom à Madeleine Wallace : « Elle pleure comme une madeleine, ou comme une fontaine… Wallace ! ». Plus récemment, elles sont reprises dans Les Animaux fantastiques : Les Crimes de Grindelwald (2018), où elles permettent de faire apparaître un passage menant directement au ministère des Affaires Magiques !

Si par malchance vous n’avez encore jamais eu l’occasion d’en croiser une au détour d’une balade ou d’un trajet, sachez qu’il existe un site dédié aux fontaines Wallaces vous proposant des parcours de promenades mettant sur votre route plusieurs de ces merveilles !

Alexis Llanos

Sources :

Image : http://www.parisbalade.fr/les-fontaines-wallace-a-paris

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