Alma Mater est allé visiter le laboratoire de Physique et mécanique des milieux hétérogènes (PMMH, UMR 7636), rattaché au CNRS, qui étudie de nombreux sujets de la physique qui nous entoure. Lors d’une interview, Damien Vandembroucq, directeur du PMMH, nous a décrit le fonctionnement du laboratoire, mais aussi la variété des sujets de recherches qui y sont menées.
Comment fonctionne le PMMH ?
Aujourd’hui, un labo comme celui-ci, c’est une centaine de personnes, dont une quarantaine qui ont des emplois de fonctionnaires. Ici, les deux tiers dépendent du CNRS, et les autres de nos partenaires académiques : l’ESPCI Paris-PSL, Sorbonne Université et Université Paris Cité.
Parmi ces personnels, on a des chercheurs et chercheuses, des maîtres de conférences et des professeurs, mais aussi une administratrice, une gestionnaire, un technicien mécanique, des ingénieurs. On a également une quarantaine d’étudiants rédigeant leur thèse. D’autres, déjà jeunes chercheurs, viennent se former avec nous juste après leur doctorat. Le fonctionnement de la recherche, ça rappelle un peu le compagnonnage. On se forme auprès d’un maître (un directeur ou une directrice de thèse) et, ensuite, on fait un tour en France ou dans le monde pour visiter d’autres laboratoires où l’on apprend de nouvelles techniques expérimentales, numériques, théoriques. C’est une formation très complémentaire de la formation universitaire, parce qu’on y apprend à voir le monde différemment, à chercher à comprendre des choses qu’on ne savait pas encore, ce qui est très différent de refaire des choses qu’on sait déjà faire. C’est évidemment un milieu très international, au laboratoire on compte à peu près deux tiers de Français, et un tiers d’étrangers d’origines variées (une quinzaine de nationalités différentes).
Quelles sont les recherches menées dans ce laboratoire ?
Nous étudions des sujets qui relèvent de la mécanique (des fluides aux solides en passant par la matière molle) avec un point de vue physique. Pour le grand public, quand on parle de physique, on pense souvent à la physique de l’infiniment grand ou de l’infiniment petit.
Ici on ne fait ni l’un ni l’autre, on cherche à explorer et à comprendre des phénomènes à une échelle plus humaine : depuis la nage d’une bactérie jusqu’à la fracturation de la banquise sous l’effet de la houle, en passant par la nucléation d’une gouttelette de rosée.
Vu par le prisme d’un œil de physicien, ça veut dire un parti-pris très réductionniste. On essaye de modéliser de la façon la plus simple possible, d’aller à l’essentiel sans s’encombrer de trop nombreux paramètres de façon à comprendre des comportements qui sont un peu génériques et qui ne vont pas dépendre des détails. De plus en plus, on s’intéresse à la mécanique du vivant ainsi qu’à la mécanique et la physique de l’environnement. Dans ce labo, on ne fait pas de climatologie, l’idée est davantage d’essayer d’isoler des petits bouts de problème et d’essayer de les ramener au laboratoire pour les étudier, éventuellement sur des systèmes analogues, mais sur une gamme de paramètres beaucoup plus grande de façon à mieux comprendre. Par exemple, nous essayons de reproduire pluie et nuage à l’échelle du laboratoire. Donc des travaux sur des expériences modèles, la plupart du temps extrêmement simplifiées, mais dont on a la faiblesse de penser qu’elles peuvent être pertinentes pour dire des choses intéressantes sur des systèmes réels. C’est un peu ça le jeu du physicien, un positionnement entre l’extrême modestie et la prétention à comprendre le monde.
Quel est votre avis sur la recherche à Sorbonne-Université de manière plus globale ?
Entre universités, écoles et centres de recherche, on est ici dans un environnement d’une densité académique absolument exceptionnelle au niveau mondial. Les labos de recherches sont pour la plupart rattachés au CNRS et dépendent de la délégation régionale Paris-Centre. On y compte environ 2 400 chercheurs CNRS. Cela fait plus de chercheurs CNRS qu’en Bretagne et Nouvelle-Aquitaine, ou qu’en Auvergne-Rhône-Alpes, sur un périmètre dont la superficie est celle d’un campus, de l’ordre de 2 km². Une densité de chercheurs à ce niveau-là, cela se retrouve peut-être à Cambridge en Angleterre ou à Cambridge aux États-Unis où on trouve le MIT et Harvard, mais sinon cela a très peu d’équivalent. Tout cela pour dire que cet environnement de recherche exceptionnel et son extraordinaire variété doivent être valorisés auprès des étudiants. À notre échelle, on essaye dans ce laboratoire d’ouvrir les portes à tout le monde, en particulier aux étudiants de façon à leur permettre de découvrir les recherches qui sont menées ici.
Jules Perrin de Brichambaut