Cet hiver, El Greco est à l’honneur au Grand Palais ! Génie du XVIe siècle aux multiples facettes, à la fois peintre d’icônes et portraitiste maniériste, il est aujourd’hui considéré comme l’un des derniers artistes de la Renaissance italienne, mais aussi comme le fondateur de l’Ecole espagnole. L’exposition qui lui est consacrée ne peut donc rester dans l’ombre !
El Greco : le dernier grand maître de la Renaissance italienne
Domenico Theotokopoulos, alias el Greco, est né en Crète en 1541, mais s’installe assez vite à Venise. Là-bas, il se détache de la tradition byzantine et de l’art des icônes et se consacre à une nouvelle forme de peinture : il cherche à réinventer la peinture religieuse, tout en s’inspirant des plus grands maîtres de son temps. On retrouve, en effet dans ses peintures ce goût pour les couleurs acides et stylisées comme chez Le Titien et Tintoret, des figures allongées, serpentines et sensuelles comme chez Pontormo, ainsi que des corps sculptés et modelés comme chez Michel-Ange. La peinture Pietà, œuvre majeure datant de 1592, est de ce point de vue assez éloquente : on y retrouve toutes ces susdites influences italiennes de la Renaissance, avec cette torsion des corps et ce jeu de couleurs — entre vert anis, ocre et bleu électrique.
Pietà, El Greco, 1592, Stavros Niarchos Collection, Paris
El Greco : un artiste moderne et avant-gardiste
Cependant, Le Greco n’est pas qu’un simple imitateur : c’est un artiste particulièrement singulier et moderne. A cause de certains conflits, El Greco se voit obligé de partir en Espagne, à Tolède, en 1576 ; il y affirme définitivement son style et s’impose comme le premier grand peintre du Siècle d’or espagnol. Les couleurs jaillissent et fulminent, les formes s’étirent et se détachent, les cadres se resserrent et étouffent, les regards transpercent et déstabilisent, l’intensité émotionnelle se fait de plus en plus forte. On pourrait alors voir dans les peintures du Greco une avant-garde des courants expressionnistes, fauves et cubistes, 300 ans avant. Nombre d’artistes du XXe siècle s’inspireront d’ailleurs du Greco, bien que pendant des années son œuvre ait été délaissée, jugée « trop excentrique ». Picasso par exemple développa une réelle passion pour El Greco : dans Les Demoiselles d’Avignon, il s’inspire des corps allongés et contorsionnés de L’Ouverture du cinquième sceau. Cézanne lui aussi, affectionnait particulièrement El Greco et s’amusait à reproduire certaines de ces œuvres, comme La Dame à l’Hermine.
Les Demoiselles d’Avignon, Picasso, 1907, Museum of Modern Art, New-York, USA.
L’Ouverture du Cinquième Sceau, El Greco, 1614, Metropolitan Museum of Art, New York, USA.
Cette exposition, d’une qualité rare, nous invite ainsi à redécouvrir ce génie de la peinture et son évolution, au travers de ses compositions audacieuses et innovantes, mises en lumière par une palette extraordinairement vive, sensuelle et émouvante.
Alors n’hésitez plus : vous avez jusqu’au 10 janvier pour aller admirer son œuvre (tarif réduit pour les étudiants : 9 euros) !
Pour en savoir plus : https://www.grandpalais.fr/fr/evenement/greco
Apolline MICHALIK