Pas tout à fait. L’ajout de « trouble du jeu vidéo » par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à la 11è édition de la Classification Internationale des Maladies (CIM-11) a beaucoup fait parler de lui. Mais revenons un peu sur ces propos qui ont souvent fait sortir de leurs gonds les adeptes de ce loisir. Une addiction est définie par un désordre cérébral caractérisé par un engagement compulsif motivé par un stimulus de récompense malgré des effets néfastes. Sans entrer dans les détails neurologiques, c’est donc une maladie qui atteint la capacité d’un individu à se contrôler et à évaluer le rapport bénéfice/risque d’un comportement. Lorsqu’elle ne concerne pas la consommation de substances dangereuses en elles-mêmes comme le tabac ou la cocaïne, l’addiction reste à surveiller de par la dépendance physique et psychique qu’elle crée. La définition de l’addiction n’est donc pas originellement associée aux drogues, et concerne n’importe quels types de comportement, comme par exemple l’addiction aux jeux d’argents, et donc pourquoi pas, le fait de jouer aux jeux vidéos.
Le développement d’un tel trouble est principalement dû au stimulus de récompense qui pousse la personne à reproduire ce comportement, ainsi que celui associé à la sensation de plaisir. C’est le principe de l’apprentissage associatif, à l’origine du désir. Il s’agit donc d’un processus intrinsèque au développement des habitudes et touche sans surprises les enfants et les adolescents en priorité. Or dans le cas des jeux vidéo, il s’agit également des populations les plus exposées. Bien que l’OMS n’emploie pas directement le terme d’addiction pour les jeux vidéos, ce sont bien les symptômes qu’elle décrit : elle appuie en effet sur le fait de prioriser ceux-ci à la vie réelle, y compris par rapport aux « activités personnelles, familiales, sociales […] ou d’autres domaines importants du fonctionnement ». Cependant, les troubles ne sont pas considérés comme des maladies, et ne sont cités que dans le but d’aiguiller les pays dans leurs stratégies de santé publique. Avec le développement récent et rapide des jeux vidéos, on peut donc comprendre l’ajout préventif de ce trouble à la CIM-11, censée prendre acte en 2022. D’ici là, chacun peut veiller à ne pas préférer une vie fictive à sa vie réelle, cela étant valable également pour les réseaux sociaux. En sachant tout de même que seule une faible partie
de la population est sujette à ce trouble, et que la simple pratique des jeux vidéos ne constitue à priori pas une menace pour la santé.
Jeanne VILLECHENOUX
Illustration : Marine CHAMBEAUDIE